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Cinthia la panthère noire

Cinthia la panthère noire

© mai 2001 Isabelle Dessaux

Il était une fois Cinthia une très belle panthère noire qui, comme toutes les panthères, aimait la sensation de liberté et l’ivresse qu’elle ressentait lorsqu’elle parcourait la savane à folle allure. Quel bonheur elle éprouvait toujours à s’évader, à délier ses pattes et à les sentir rebondir sur la terre, à défouler son corps et défier l’air, elle avait la sensation de voler, que rien ne pouvait l’arrêter !

Cinthia aurait continué à s’élancer passionnément à travers les dunes toute sa vie si une sordide bande de chasseurs de fauve n’en avait décidé autrement ! En effet, un jour regrettable, alors que notre belle panthère gambadait allègrement dans la jungle, elle reçut la balle du fusil d’un de ces maudits chasseurs en plein cœur de sa patte avant gauche ! Quelle douleur, quel mauvais coup du sort ! Cinthia réussit à se cacher pour ne pas être faite prisonnière, voire tuée par ces êtres empreints de cruauté. Elle resta ensuite plusieurs jours couchée, tapie dans son terrier à pleurer tout le malheur qui l’accablait, toute sa rage contre ses chasseurs qui la condamnaient ainsi à l’immobilité, l’amputant de son plus grand plaisir, mutilant son capital le plus précieux. La balle s’était curieusement logée dans sa chair, sans éclaboussure ni fracas.

Cinthia a bien réessayé à plusieurs reprises d’accélérer le pas lors de ses promenades dans la savane, mais cette intruse dans sa patte réactivait à chaque fois une douleur insupportable. Il est vrai qu’il n’est pas possible de pouvoir courir dans ces conditions, Cinthia le savait bien mais elle savait aussi surtout qu’elle serait obligée de recourir au sorcier guérisseur du village des indigènes pour extraire la balle. Et notre belle panthère avait ce curieux personnage en horreur, elle se disait qu’il n’était qu’un charlatan incapable, comme le sont tous les guérisseurs de son espèce. Elle aurait tant aimé avoir affaire directement à Abigaëlle à qui le Dieu de la Médecine avait inculqué tout son savoir et qui, elle seule, aurait pu accomplir cette intervention miraculeuse. Mais, comble du comble, seul le sorcier guérisseur aurait pu conduire Cinthia à Abigaëlle et elle se refusait obstinément et catégoriquement à approcher ce personnage de près ou de loin. Cinthia se résigna donc et passa 6 longues lunes à rester prisonnière de sa blessure et de son incapacité à se mouvoir comme elle aimait tant le faire autrefois, avant… Elle essayait de se contenter de marcher tranquillement dans les dunes et tentait de se rassurer en se disant qu’au moins elle avait encore cette possibilité et qu’il lui fallait se préserver…même s’il lui arrivait aussi pourtant de pester contre ces chasseurs et ce maudit sorcier guérisseur ! Cinthia se sentait dans un cul de sac, elle était comme éteinte. Elle essayait de dissimuler sa tristesse sous une façade calme et sereine mais chacun savait bien qu’il n’en était rien ! Les indigènes avaient tenté de la persuader d’aller voir le sorcier mais en vain…

…Jusqu’au jour où, alors que Cinthia se promenait sur son chemin préféré, elle tomba brusquement dans un trou creusé en dessous de fougères ! En plus du choc d’être happée par le vide, son arrière train reçut en tombant au sol une violente piqûre qui la fit bondir d’un saut extraordinaire en dehors du trou ! Prenant conscience en un éclair que ces satanés chausseurs lui avaient tendu ce piège ignoble pour l’empoisonner et la capturer, elle eut soudainement la vision de ce qui lui restait de liberté en péril et, malgré la douleur dans sa patte, Cinthia se mit à courir à tout rompre pour rejoindre le village des indigènes avant que le poison n’ait raison de ses forces.

Elle courut à en perdre haleine jusqu’à la case du sorcier guérisseur qui heureusement était là, l’implorant de couper au plus vite le pouvoir maléfique de ce venin qui la mettait progressivement dans un état d’endormissement certain ! Celui-ci lui répondit qu’il ne pouvait malheureusement rien faire et que seule Abigaëlle connaissait la formule et possédait la potion magique appropriée. Il fallait faire vite, Cinthia perdait peu à peu connaissance ! Les indigènes installèrent la panthère en un temps 3 mouvements sur un brancard fait de bâtons et d’un tissu dont ils se servaient habituellement pour ramener le gibier et l’amenèrent au pas de course jusqu’à la demeure secrète d’Abigaëlle, guidée par le sorcier guérisseur. Etonnamment, Abigaëlle s’était déjà préparée à intervenir pour sauver celle qu’elle attendait depuis plusieurs années, prévenue des faits dès le début par le Dieu de la Médecine avec qui elle était en connexion permanente. Comme tous les sages, Abigaëlle avait foi en la Déesse de la Vie et savait bien que la synchronicité qui rendrait son plein potentiel à Cinthia aurait lieu inéluctablement…Abigaëlle eut le cœur content que ce jour béni fusse arrivé…

Cinthia avait totalement perdu connaissance, il suffit à Abigaëlle de quelques heureuses formules pour transformer le venin en une douce nourriture pour le corps de la panthère et pouvoir ensuite extraire délicatement l’intruse de sa patte.

Curieusement, Cinthia se réveilla par une douce journée ensoleillée au beau milieu de la savane et eut le plaisir de ressentir instantanément une chaude énergie parcourir vigoureusement chacun de ses membres…

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