L’avant-ture de Diane Lapin
© 2000 Pierre-Yves Bassin
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Comme à son habitude, alors que ses petits s’endormaient paisiblement, encore tout ébahis au souvenir de leurs jeux, Diane Lapin sortait sur le devant de la maison et se mettait à rêver en regardant tout au loin, au sommet de la colline, le magnifique château illuminé qui dominait la vallée. ” Comme il brille ! Et comme il fera bon y entrer ! “, se disait au plus profond d’elle-même Diane Lapin, alors que les premiers flocons de neige d’un hiver précoce commençaient à tomber, monotones. ” Il paraît qu’il est habité par un sage qui, chaque jour, entretient un grand feu dans la cheminée. Mmh ! Comme il doit faire bon là-haut, entendre le crépitement du bois dans le foyer, respirer l’odeur du feu “.
” Mais bon, avec mes petites pattes de lapin, il me faudra au moins 3 ou 4 lunes pour y arriver. Et puis… et puis il y a mes petits. Ils sont bien trop jeunes pour se débrouiller sans moi. Ils ont encore besoin de moi “. Et tous les soirs, Diane Lapin s’installait devant la maison et se laissait aller à son rêve d’avant-ture.
Une nuit, alors que tout sommeillait autour d’elle, son regard fut attiré par une lumière particulièrement brillante. C’était la lune qui se reflétait dans le ruisseau, et qui semblait l’interpeller. Elle l’invitait à la suivre. Elle ne pouvait pas partir comme ça… Et pourtant, l’invitation était tellement forte que, sans réveiller ses petits, elle les enveloppa dans son sac à dos et s’en alla rejoindre la lune au bord de l’eau.
Pendant plusieurs soleils et plusieurs lunes, elle marcha, suivant le cours du ruisseau, remontant bond après bond vers le sommet de la colline. Mais que la route était longue et pénible…, et Diane Lapin, portant ses petits dans son sac à dos, faillit abandonner plusieurs fois pour retourner vers sa petite maison douillette. Mais la lune, le soleil et la rivière semblaient s’être associés pour l’encourager à poursuivre son avant-ture jusqu’au bout.
En chemin, alors que ses forces commençaient à l’abandonner, elle rencontra un tout petit animal, pas plus gros qu’une marmotte. ” Oh là ! Mais tu me sembles bien chargée ! Tu vas t’épuiser de la sorte. Que transportes-tu dans ton gros sac à dos ? ” ” Ben, ce sont mes petits laper-eaux, qui ne peuvent pas effectuer un tel parcours à pieds. Ils sont bien trop petits ! ” ” Je comprends bien, mais voilà des petits bien pesants. Il faut alléger ton sac à l’eau… N’as-tu pas remarqué dans quel sens coule cette rivière ? N’as-tu pas remarqué qu’elle coule en direction du château ? Ton sac fera une excellente embarcation pour tes petits laper-eaux. ”
Et c’est ainsi que Diane Lapin continua son avant-ture, en direction du château.